L'éditorial de Cathy Dos Santos

Affaire Bétharram : des mutismes qui font système

Publié le 25 février 2025

L’écheveau se démêle à mesure que la parole des victimes de Notre-Dame de Bétharram se libère. Les mots sont durs, violents ; ils disent toute la souffrance endurée et emmurée durant des décennies. La chape de plomb qui a étouffé la voix de ces enfants maltraités, violés est insupportable car elle renvoie à des dysfonctionnements politiques et institutionnels d’un autre âge.

Michel a été marqué au fer rouge, nous confie-t-il. Son témoignage dans nos colonnes est inédit ; il est aussi glaçant que les murs de l’institution catholique qui a volé son enfance et traumatisé le reste de son existence. Son récit est accablant, car il accuse nommément un directeur de cet établissement privé d’avoir commis des violences sexuelles.

Jean Tipy n’aura jamais à répondre de ces accusations. Il a poursuivi sa carrière d’enseignant dans d’autres centres scolaires, à Limoges, mais également à Stanislas, à la réputation sulfureuse, avant de décéder en 2009. C’est le deuxième directeur à être incriminé. Cela fait beaucoup.

Les plus de 140 plaignants ont, un jour ou l’autre, raconté leurs souffrances. En guise d’écoute, ils ont été ignorés. Au sein de l’institution, ils ont subi dédain et punitions par des personnels qui ont délibérément couvert des atrocités. À croire qu’à Bétharram, la parole n’a jamais été d’évangile.

Difficile d’imaginer que de tels agissements ne sont jamais parvenus jusqu’aux oreilles de la congrégation des bétharramites, que la hiérarchie de l’Église n’a jamais su à quel sadisme se livraient ces hommes de Dieu. Les mutismes ont jusqu’alors fait système. Cette omerta se fissure aujourd’hui. La plainte pour non-dénonciation de crime déposée contre François Bayrou, conseiller général et député du territoire à l’époque des faits incriminés, ne relève pas d’une cabale. Elle participe à faire toute la lumière sur les violences sexuelles et psychologiques perpétrées dans cet établissement. Certaines sont prescrites, d’autres non.

À la justice de poursuivre le travail. Mais quoi qu’il advienne, le fonctionnement de ces institutions privées et catholiques, trop souvent incompatible avec le droit, la laïcité et les missions de la République, comme on l’a vu à Stanislas, devra lui aussi être revu à l’aune de ce nouveau scandale. Elles ne peuvent jouir d’aucune complicité morale et politique.

Le journal des intelligences libres

« C’est par des informations étendues et exactes que nous voudrions donner à toutes les intelligences libres le moyen de comprendre et de juger elles-mêmes les événements du monde. »
Tel était « Notre but », comme l’écrivait Jean Jaurès dans le premier éditorial de l’Humanité.
120 ans plus tard, il n’a pas changé.
Grâce à vous.

Soutenez-nous ! Votre don sera défiscalisé : donner 5€ vous reviendra à 1.65€. Le prix d’un café.
Je veux en savoir plus !

Lisez la suite de cet article

et débloquez tous les contenus

Je m’abonne


à lire aussi

Soumission chimique : un procès requis contre le sénateur Joël Guerriau

Féminisme

Publié le 8 avril 2025

Au « bagne pour enfants » de Riaumont, les députés de la commission d'enquête face aux incohérences des autorités

Société

Publié le 4 avril 2025

Violences sexistes et sexuelles : après Bétharram, des personnes témoignent des sévices subies à l’Institution Saint-Dominique de Neuilly-sur-Seine

Société

Publié le 4 avril 2025

Vidéos les plus vues

Sondages sur l'opinion des français : ils n'ont AUCUN sens

Publié le Publié le 10 avril 2025

Faut-il être SORORE avec Marine Le Pen ? Hélène Vézier vous a posé la question

Publié le Publié le 9 avril 2025

Le meeting du RN pour « sauver la démocratie » est un FLOP

Publié le Publié le 9 avril 2025

Avec Élisabeth Borne, pas d'enfance pour nos gamins !

Publié le Publié le 9 avril 2025

« La connaissance, c’est pas du business ! » : les étudiants mobilisés face aux coupes budgétaires

Publié le Publié le 8 avril 2025

11 sinistrés climatiques attaquent l’État français

Publié le Publié le 8 avril 2025